massacre à la tronconneuse
Dans mon quartier,
on se regalait d'aller faire un petit tour à la sourcette,
un creux ou coule un petit filet d'eau
ou s'abreuvent sangliers et chevreuils.
On emmenait les enfants, on leur expliquait les plantes,
les arbres, les traces d'animaux.
L'école du quartier ouvrait ses portes au printemps
pour les petites classes de maternelle,
qui marchaient en chantant jusqu'à la sourcette.
Les petits vieux qui ne pouvaient grimper la colline
se promenaient jusqu'à la sourcette,
petite boucle courte pour les pieds fatigués.
Les amoureux de la nature y trouvaient
toutes les prémisses d'une grande balade plus sauvage.
Sur le chemin menant à la sourcette,
on se regalait les yeux et le coeur devant un magnifique bouleau,
dont la blanche écorce luisait au soleil,
tranchant sur tout le vert et le brun de la forêt.
Haut, solitaire, magnifique specimen
de la beauté et de la tranquilité de la nature.
Ils ont massacré le bouleau.
Lui seul.
Coupé en cinq morceaux, abattu en plein milieu du chemin.
Pourquoi?
C'est vrai, ils avaient déjà massacré
tous les abords du chemin qui montait.
Des tronconneurs invisibles ont pris les troncs
et laissés sur place un fouillis hideux de branches enchevétrées.
On s'est dit qu'ils allaient élargir le chemin.
On a commencé à raler dans les chaumières.
On a téléphoné à la mairie pour savoir ce qui se passe.
On nous a répondu des choses tellement évasives
qu'on s'est dit qu'ils n'étaient peut-être pas au courrant.
On les as mis au courrant.
Aprés, ils ont massacré le bouleau.