l'âme de la yourte
Tous ces gens qui veulent maintenant
habiter dans une yourte,
au fond, ce que je crois, ce qu'ils veulent,
c'est rencontrer dans leur nudité, leur profondeur,
leur être le plus authentique.
Ce qu'ils cherchent, au fond, je le crois,
n'est-ce pas ce Soi en arrière des contingences
qui tient lieu de refuge et repaire
aux quéteurs de vérité?
Ces gens qui se mettent à désirer la yourte,
au fond, je le crois, ce qu'ils vont rencontrer
en tournant le dos aux vitrines,
en cisaillant leurs grilles,
pourrait être ce Tao silencieux et joyeux
qui ramène au milieu
ce dehors et ce dedans si écartelés
qu'ils ont failli éclater en mille morceaux.
Ce qu'il rêvent, au fond, n'est-ce pas, comme je le crois,
de s'extirper lucidement de la démesure
pour habiter sans fracas dans la simplicité?
Tous ces gens qui maintenant
refusent d'attendre le train de la conformité,
qui veulent quitter leur béton,
rendre leur chéquier et tailler les perches de leur toit,
ne sont ils pas, au fond, comme je le pressens,
en train de refuser de continuer
à se dérober d'eux-mêmes?
La yourte pourrait leur dire,
de la bouche d'Etty Hillesum:
« Ah! Laissez moi donc être la baraque- refuge
de la meilleure part de vous-même,
cette part certainement présente
en chacun de vous.
De ce corps, laissez moi donc être l'âme. »