Compte rendu de la rencontre du peuple des yourtes
Compte rendu de la première rencontre nationale
d'habitants et de fabricants de yourtes:
Bienvenue les yourtes.
Suite à un appel lancé aux rencontres de l'habitat choisi l'été 2009 à Bussière Boffy, et au relais dans les réseaux de l'information,
habitants en yourtes, fabricants, porteurs de projets d'auto-construction ou d'installation, curieux motivés,
rassemblée en un week end au camping du Mignon,
en Marais Poitevin,
a débattu autour du thème de la yourte.
Pour parler de quoi? Mais aussi pour faire quoi?
Dès vendredi matin, nous mettons les mains à la pâte
en lançant la construction d'une yourte
pour le collectif de Bussière Boffy.
L'équipe de la Frênaie met à disposition,
en plus de l'hébergement,
avec de bons lits enchanteurs,
son matériel et son savoir-faire.
Les néophytes peuvent s'exercer aux différentes étapes artisanales,
entrecoupées de visites explicatives à l'atelier de fabrication
situé à quelques kilomètres.
Copeaux, petits trous, nœuds,
scie sauteuse.
A 13h, le collage de la couronne est abouti
et le travail sur l'ossature bien avancé,
il se poursuivra pendant le week end.
L'après midi, nous nous présentons, et nous échangeons sur nos expériences autour de nos implantations respectives en yourtes, problèmes, facilités, appuis, recettes, spontanéité, liberté et obstacles pour vivre tranquille dans sa yourte....
Le samedi matin est consacré à un point sur les éléments juridiques que nous avons pour essayer de faire rentrer dans des cases carrées notre truc rond!
Samedi après midi nous attaquons le vif du sujet:
mettre au point ensemble une stratégie pour exister et durer dans nos yourtes, à la place qui est la nôtre: sur la terre, au cœur de nos territoires.
Cette discussion se poursuit le lendemain pour dégager des accords a minima..
L'après midi du dimanche, tandis que les fabricants lancent la couture de la yourte à l'atelier, les personnes qui le souhaitent se retrouvent dans la grande yourte pour un échange sur les pratiques de vie en yourte,
et comment faire pour l'eau, l'électricité, le chauffage,
bref, des détails importants!
Nous tenons à remercier
le collectif Radikal Cocotte,
qui nous a régalé tout le week end de délicieux repas végétaliens,
ainsi que Jibé qui a pétri, et cuit avec talent le pain pour le week end.
Merci à tous ceux qui sont venus
de loin et de moins loin pour participer,
merci à ceux qui ont trouvé l'idée géniale
mais qui n'ont pas pu venir et ont rêvé cette rencontre avec nous.
Après-midi du Vendredi.
Il n'existe apparemment pas de recette pour s'implanter en yourte (ou autre habitat atypique), néanmoins...
Avoir une politique d'ouverture au niveau individuel d'abord, puis collectif, semble être un facteur clef de la réussite d'une implantation.
Il faut affirmer ses idées et ses choix quel que soit le public que l'on a en face.
(« Même si je ne suis pas d'accord avec vos idées, affirmez-les! », parole d'un élu anti-yourte...!).
Lorsqu'un souci d'expulsion peut avoir poussé certains à sortir des bois pour s'affirmer et se regrouper, ces derniers ne le regrettent pas et gagnent en assurance et légitimité.
La démarche citoyenne est souvent moteur dans les installations en yourte ou autre habitats atypiques.
Cette logique peut être poussée plus loin, jusqu'à un niveau politique plus assumé, en montant une liste pour intégrer une équipe municipale par exemple. Il y aurait déjà au moins un maire en France qui habite en yourte...
Dans certains combats, la solidarité, la logique de réseau est primordiale pour établir un rapport de force. Problèmes ou pas, ce réseau doit exister et il est à construire, de nombreux yourteux-ses et autres habitant-es atypiques sont encore isolés.
Malgré des expériences inégales quant à l'impact des médias pour les personnes confrontées à des problèmes avec leur yourtes, il semble qu'ils sont utiles quand même, en particulier dans la construction d'un rapport de force au cours de luttes juridiques locales, et qu'il vaut mieux ne pas leur fermer la porte, en tentant de négocier notre image si possible. Et aller plus loin, en créant nos propres médias, blogs, films etc.
D'après les expériences réunies, les agriculteurs sont souvent des appuis précieux pour s'implanter en yourte ou autre H. atypique.
Il sont des portes d'entrées privilégiées sur les territoires, d'autant que bien des projets d'installation en yourte s'accompagnent de projets maraichers ou d'auto-subsistance.
Résumé:
1) Politique d'ouverture, d'affirmation de ses idées et ses choix, s'engager politiquement pour participer à l'organisation des territoires. Les partis politiques ne peuvent intégrer au réseau mais peuvent le soutenir et porter nos revendications, juridiques, écologiques, sociales, etc...
2) Solidarité entre yourteurs-ses, (ou autres habitants atypiques et conventionnels) pour installer un rapport de force là où sévit la réaction et la répression contre nos habitats. Nous sommes de plus en plus nombreux!
3) Création d'outils: un réseau ou une association d'élus favorables à l'implantation de yourtes ou autres habitations atypiques, un réseau d'agriculteurs, intégrateurs sur les territoire, permettant d'éviter d'être propriétaire, une réflexion commune pour gérer notre représentativité, avec priorité aux médias alternatifs.
Matinée du samedi
Il n'existe pas de cadre juridique spécifique à la yourte en matière d'urbanisme.
La yourte peut prendre plusieurs qualifications juridiques en fonction de sa destination : tente, habitation légère de loisirs, construction de droit commun, habitat des gens du voyage...
Ainsi, elle peut dépendre de régimes juridiques différents (permis de construire, déclaration préalable...), être soumise à des contraintes plus ou moins importantes en fonction du terrain d'installation (zone agricole, zone constructible, terrain de camping...).
Les nombreuses questions au gouvernement, à l'AN ou au Sénat sur le sujet de la yourte démontrent un certain flou juridique.
La complexité des règles de droit amène à la prédominance d'une politique de guichet : une reconnaissance et acceptation de la yourte en fonction du maire, de la DDE, des pressions locales...
Exemple de Bussière Boffy et du harcèlement voire même de la discrimination que subissent les habitants.(sous yourtes, en roulottes...) Dernièrement, le maire a pris un arrêté d'interdiction de camping qui a fait l'objet d'un recours devant le tribunal administratif de Limoges (jugement sera rendu le 19 octobre)
Contre exemple du maire de St Hilaire la Pallud,
venu à « la rencontre des yourteux »,
qui propose de prendre en compte les yourtes dans le nouveau plan local d'urbanisme de la commune (en cours de réalisation).
Il demande que nous lui proposions des arguments pour que puissent être définis des emplacements : parcs résidentiels de loisirs, terrains de vie, zones naturelles ?
La jurisprudence interprète les règles de droit relatives à l'implantation d'une yourte. Elle n'est pas stable en la matière et dépend des tribunaux ou Cours d'appel (aucun arrêt de la cour de cassation sur la question pour l'instant).
Dans l'affaire de l'expulsion de Sylvie Barbe (Cantoyourte), la yourte n'a pas été considérée comme un bien immobilier, donc non soumise au régime du permis de construire.
*Comment faire évoluer les choses :
Pour une reconnaissance ponctuelle : s'intégrer dans la vie du village, payer les taxes (ex: enlèvement des ordures ménagères)...
Pour une reconnaissance globale :
- déterminer une identité à la yourte ( réversibilité, empreinte écologique, rond, éphémère, choisi...?)
- rassembler et diffuser les décisions de justice et les arguments des avocats.
- faire du droit comparé, étudier les règles de droit en la matière dans les autres pays (Europe du Nord...)
- revendiquer un statut juridique de droit commun pour la yourte, voire pour les habitats légers et mobiles (dépasser le statut dérogatoire insatisfaisant des gens du voyage).
- affirmer notre spécificité et légitimité comme réponse à la crise immobilière, sociale et écologique.
Après midi du Samedi
A la fin de cette après midi, nous avons déjà une esquisse de ce que nous devons créer et de ce qui est à notre disposition pour avancer.
Le plus immédiat est de créer un réseau et de le faire vivre à travers des personnes ressources.
Ces personnes ressources devront être formées, l'idée de la formation du type de celle proposée par le DAL fait son chemin.
L'idée du réseau d'élus est aussi à l'étude.
Il n'apparaît pas non plus nécessaire de créer des réseaux de toutes pièces, la coordination des réseaux pour un habitat choisi fonctionne déjà, le blog de Sylvie est déjà bien fédérateur pour ce qui concerne les yourtes, les associations RELIER et terre de Liens existent aussi.
Niveau événement, les rencontres annuelles de l'habitat choisi se font déjà à l'initiative d'HALEM, et le collectif Dordogne se propose de créer un festival.
Des documents existent déjà (document de travail de B Messini, et autres en cours de vulgarisation) ou sont en train d'être produits (fiches mémento juridiques de Henri).
On évoque aussi la possibilité de créer un site internet ressource en SPIP.
L'idée de réfléchir et fonder une ou des chartes est aussi évoquée, mais repoussée à plus de maturité du réseau yourte..
Matinée du dimanche
Nous actons la création de groupes locaux autonomes, libres à eux de se créer leur propre identité, sans contrainte de restriction à la yourte, libre à eux d'adhérer à une charte existante ou autre.
Une nécessité cependant pour ces groupes: faire remonter les informations importantes au niveau national, en particulier les problèmes juridiques ou administratifs, afin que les cas soient redirigés vers les militants et juristes spécialisés du réseau.
Les groupes locaux sont avertis par Clément de Halem de bien prendre garde que la distinction yourtes/ autres habitats éphémères ne se fasse pas au détriment de ces derniers, du genre: « les yourtes sont durables, pas les caravanes ».
Certains groupes peuvent adhérer à Halem s'ils en éprouvent l'utilité, bien qu'un consensus général s'accorde pour que le Réseau Yourte affirme prioritairement son identité avant d'autres affiliations plus générales.
Pour ce qui est de la formation, elle aurait lieu du 2 au 5 avril 2010 à l'Estrade à Argein (Ariège), à destination des référents des groupes locaux (max 12 personnes); un groupe de travail va plancher sur les objectifs et le contenu.
Une association nationale peut voir le jour afin de mieux structurer les luttes du peuple des yourtes et pouvoir ouvrir un compte bancaire. Une cagnotte pourrait se constituer pour aider à financer les défenses des yourteurs mis en cause pour leur mode de vie, mais aussi pour l'organisation d'autres rencontres, d'autres formations, sur d'autres régions, afin que l'ensemble des yourteurs du territoire national puisse contribuer et bénéficier de l'émergence de notre toute jeune force.
Bref, tout est encore à faire!
Compte rendu rédigé par Joseph, revu et illustré par Sylvie.
Personnes ressources du Rezo Yourte là