Marche pas dans la salade!
«Dans un monde ou tout est compétition, celui qui ne pratique pas la compétition est coupable de ne pas jouer le jeu, et celui qui perd est coupable vis-à-vis de lui-même.
Mais tu peux choisir l’autre voie, celle de l’acceptation de la différence.
Il est vrai que, dans un premier temps, tu seras sans doute rejeté.
Dis-toi alors que le milieu que tu fréquentais n’était pas le tien.
En confirmant qui tu es, tu marcheras dans tes pompes.
A ce moment là, tu aides vraiment les autres par ton témoignage de toi-même et les autres peuvent rayonner de ton rayonnement.
Car n’oublie jamais qu’un être qui devient lui-même est tellement à sa place dans l’univers qu’il ne peut que rayonner.»
Jean Hoyoux. «Noos, la naissance à l’esprit.»
Comment prendre les bonnes décisions
sans plonger au fond de soi?
Comment plonger au fond de soi
quand on est sans cesse englué dans le fonctionnement?
Ceux qui remplissent des fonctions, innombrables esclaves de travaux inventés contre la liberté, ne réfléchissent que pour l'efficience.
Leurs décisions utilitaristes ne touchent jamais la direction vitale, ni le sens.
Le volant du monde a été abandonné à des milliards de fonctionnants méritants, formatés consentants sous la férule de la mécanique globale, heureux de leur adéquation comme les boulons qui maintiennent la machine, soudés par la peur d'un changement qui puisse, ô malheur, les affranchir.
Programmés pour fonctionner sans grincer, fiers de leurs certificats de validité, de leur tampon de série, de leur garantie de remboursement mensongère, de leur solvabilité à crédit, ils sont rangés dans des casiers aménagés fonctionnellement pour qu'un seul bouton délivre leur panacée: l'huile des rouages et le carburant.
Parfois, ça ressemble à Disney Land, parfois à un WE branché dans une cabane perchée pas trop loin de la capitale,
le plus souvent aux galeries marchandes dégorgeant d'objets hideux,
et toujours en voiture.
Je l'ai dit,( là,) ils ne s'arrêtent jamais.
La panne n'est pas un risque,
encore moins un avertissement,
c'est une donnée prévisible couverte par les assurances, couvertes par les banques qui fournissent l'huile de rouage et le pétrole qu'ils volent partout à la terre.
Et la terre, saignée à blanc, n'en peut plus.
Elle a beau dire de s'arrêter, la machine est emballée.
Les fonctionnants continuent à y déverser le feu de la terre, la fête bat son plein dans le grand salon planétaire, le vacarme est à son comble, tout le monde est saoul.
Mais la terre, exsangue, n'en peut plus.
Quand elle les a mis au monde, elle ne voulait pas ça.
Ce jardin brulé, ce désert qui gagne, est-ce ce qu'elle espérait?
Ils ont eu l'héritage, mais ils le saccagent.
Ces prédateurs, ces meurtriers, ne sont plus ses enfants.
A moins qu'il n'y ait une loi, qui ne dépend pas d'elle, qui autorise les enfants à tuer leurs parents. Et les parents à tuer leurs enfants.
C'est possible, mais elle est certaine que ça ne vient pas d'elle.
Du ciel peut-être, ou d'ailleurs, qui sait?
Quand on ne sait plus, on se tait.
Quand on se perd, on s'arrête,
Quand on va pas bien, on jeûne.
«Le jeûne est pour la vie intérieure ce que les yeux sont pour le monde qui nous entoure.» Gandhi
Après un jeûne d'une semaine et l'évacuation de quelques miasmes récidivants, j'ai repris une alimentation très frugale et totalement naturelle, en ne consommant que des plantes sauvages cueillies dans la campagne.
Une journée béate commence, où chaque geste devient danse,
et chaque danse, prière.
Plus d'heure pour se lever, les étoiles sont mes rêves,
la lune mon lustre, le soleil mon éveil.
Plus d'heure pour méditer,
le juste moment vient de lui-même, essentiel, nu.
Plus d'heure pour travailler,
le geste simple et attentif de l'artisan,
le geste spontané et inspiré de l'artiste,
s'extraient royalement de la gangue des obligations.
Pus d'heures ouvrables pour les courses,
j'arpente l'épicerie à ciel ouvert des collines cevenoles.
Une bougie suffit, une casserole, un bol,
une scie pour le bois,
des brocs sous le ruissellement du toit de la cabane,
de vieux pulls entassés, enlevés dés que le soleil de midi
caresse la peau et charge l'énergie.
Plus de nouvelles du monde qui rugit.
Le nouveau monde est là,
complet, tranquille, puissant, absolu, offert.
Quel voyage!
J'allume un petit feu avec quelques brindilles et branchettes entassées entre des pierres pour faire bouillir l'eau de ma tisane. Ce sont les dernières fleurs de bruyère, les petits pétales roses tournent au parme et pâlissent, puis deviennent grises et sèches, il faudra attendre la prochaine floraison pour une nouvelle récolte.
Les arbouses, ramassées par terre au pied de l'arbre,
que je pose délicatement sur ma langue, sont un délice, un feu d'artifice de sensations profondes. Le gout sucré, la texture pâteuse de la chair orange que d'ordinaire que j'apprécie pas outre mesure, enchantent mes papilles, comme si je dégustais ce petit fruit pour la première fois de ma vie. J'honore chaque petite boule d'une longue salivation, la laisse fondre toute seule dans la bouche, l'avale avec délectation et reconnaissance.
Et je me moque bien maintenant des minuscules grainons qui vont se coincer entre mes dents, parce que je ne râle plus, j'ai plaisir à les déloger une à une pour les croquer et avaler de l'arbouse son dernier suc.
Déambulant à petits pas sur les restanques, je m'accroupis pour croquer du bout des dents les feuilles tendres des rosettes de porcelle et de bourse à pasteur qui émergent des interstices rocailleux et de la terre fraiche et humide. Puis les suce lentement pour m'imprégner de leur suavité. La douceur de cette salade sauvage me ravit jusqu'au fond du ventre.
Plus tard, je la mélangerais au pissenlit et à la pariétaire, mais pas à la salade de nombril de vénus et d'orpin dont le goût frais particulier vaut d'être réservé.
Un peu plus haut, j'ai gardé des récoltes précédentes offertes aux copains, sous les salsepareilles enchevêtrées, de beaux lactaires délicieux, que j'accommode avec une poignée de châtaignes, pour ma soupe. Leur chair ferme que je n'aime pas trop à la poêle me paraît exquise passée au moulin à légumes.
Quand même, ma préférence va à la coulemelle et aux girolles
Quand on a trop, on jette; quand on manque, on cherche,
quand on a tout, on donne, quand on a rien, on reçoit.
J'approche, doucement je l'approche.
Elle attend depuis toujours.
Je croyais qu'elle n'était qu'aux hommes et aux accoucheuses...
La sagesse.
Jusqu'à cette vision, à trente ans,
d'un être accompli vivant solitaire et brillant,
ermite assis en tailleur à l'entrée de sa grotte,
au bord d'une falaise,
un tigre et un mouton à ses cotés.
Là, j'ai su où j'allais.
Plus je l'ai su, plus il y eut d'écarts et d'embûches.
Plus j'ai souffert, plus j'ai perdu ma vie,
et plus je lui ai appartenu de toute origine.
On peut la fréquenter de son vivant
si on a la chance de la rencontrer pas trop loin de soi.
Sinon, il faut la chercher,
c'est souvent une grande épreuve initiatique.
Car il faut sortir des normes, du moule, de l'horloge,
des règles et des modes d'emploi.
Il faut accepter que le plancher de sa yourte
ne soit jamais totalement de niveau,
parce qu'un arbre, ça ne pousse pas carré.
Il faut aller dans la forêt sans boussole,
baisser la tête vers l'humus pour survivre,
et la lever pour se laisser héberger par les étoiles.
Il faut parler aux oiseaux et apprendre le silence.
Ce jour là, de la sagesse, arrivera quand je n'en parlerais plus.
Quand il n'y aura plus personne,
ni en moi, ni dehors, pour observer.
Quand le présent sera éternel.
Si on change sa pensée, on peut changer ses actes.
Si on change ses actes, on peut changer ses habitudes.
Si on change ses habitudes, on peut changer son caractère.
Si on change son caractère, on peut changer son destin.