S'expulser en dansant: enlèvement du dessous.
Démantèlement, intense comme un accouchement,
du camp de yourtes.
Lieu de joie, extirpé il y a cinq ans,
fermement mais sans violence,
de la friche sauvage et de l'abandon,
offert maintenant aux saccageurs.
Dernière nuit au creux de la belle Shamatha.
Dernières extases
au sein du grand mandala de patchwork;
Après la pluie, lentement, tombent un à un
les jupons du dessous de Shamatha,
la grande yourte....
Les jupons de beauté,
les jupons de douceur,
les jupons de chaleur.
Plaisir infini de baigner
dans les joyaux du soleil
filtrant à travers les couleurs.
« En vivant avec nos émotions, tôt ou tard,
l'habitude de trouver une cause va nous quitter...
En laissant l'émotion s'étaler,
se vider dans le cœur,
vous admettez votre propre nullité,
votre incapacité à gérer l'instant,
et vous retrouvez cette vibration de l'essentiel....
Quand on commence à pressentir la force,
la beauté de l'émotion,
on s'aperçoit combien
tous les systèmes de pensée spirituels sont superficiels.
Les dogmes, les analyses, les savoirs,
les fantaisies sur l'énergie et l'éveil,
ne sont que des projections
faites de nos misérables événements psychiques,
lesquels ne sont que des étincelles de l'émotion profonde.
Le besoin qu'a l'homme de codifier, d'expliquer,
d'avoir un début et une fin, tout cet imaginaire,
cet arrivisme pseudo-spirituel,
ont créé les religions d'Orient et d'Occident.
La plupart des gens sont incapables
de faire face à leurs émotions.
Ils ont trop peur de la folie....(...)
J'ai rêvé ma vie. J'ai tout inventé.
Rien de tout cela n'existe, sauf ma peur,
la codification de ma peur.
Ma vie est la représentation de cette peur.
La peur qui m'a fait...avoir
telle forme de maison, la peindre de telle couleur,
qui me fait m'habiller, me tenir, respirer, parler,
me présenter de telle manière,
qui m'attache à telle idée politique et sociale,
à tel goût littéraire ou cinématographique.
Tout cela est ma peur qui joue dans sa splendeur....
Je me rends compte que la vie que je me suis créé,
les capacités que j'ai cherché à développer,
la force, le courage, l'intelligence, la spiritualité, la méditation,
la sagesse ou autres balivernes, tous ces éléments,
je les ai développés pour ne pas faire face
à l'émotion qui m'habite constamment.
D'un coup, je me réveille,
je me rends compte qu'il n'y a là que prétention,
que je ne suis rien de tout cela.
Ce moment d'humilité, de non-savoir,
cette abdication,
est le vrai savoir,
la vraie sécurité.»
Eric Baret: « De l'abandon»