La fin d'un combat.
Larmes de joie, larmes de soulagement.
Étape décisive de la lutte pour le droit d'habiter dans une yourte :
après une condamnation de Tom et Léa pour absence de permis de construire de leur yourte, la cour d'appel de Toulouse vient de reconnaître enfin la vérité que nous clamons depuis des années, à savoir que la yourte est une tente et non pas un bâtiment dépendant du Permis de Construire et du code de l'urbanisme.
Tom et Léa ont donc été relaxés et peuvent continuer à vivre dans leur yourte légalement.
Ce jugement devrait porter un coup d'arrêt définitif aux menaces et procès abusifs intentés par les DDE, dont sont victimes depuis 2001 les habitants des yourtes.
Il est le fruit des mobilisations et des travaux étalés sur plus d'une décennie de tous les militants de la yourte qui se sont investis dans la défense de ce mode de vie choisi par de plus en plus de personnes.
Il est malheureux qu'il ait fallu tant de peine pour obtenir la reconnaissance d'un droit qui n'a jamais fait l'objet d'aucune interdiction, mais qui nous a été disputé avec une mauvaise foi belliqueuse par les réactionnaires exécutants de l'État sur les territoires. Bien que ces gens là aient eu tort depuis le début, ils ont profité de l'ignorance généralisée sur le statut des yourtes pour attaquer des foyers sans défense. Les DDE n'ont pu gagné que par l'inexistence ou l'inconsistance de la défense des yourteurs. Menaces et pressions ont bien souvent été suffisantes pour décourager des familles effarées de se trouver la cible de tant de malveillances.
La jurisprudence, au nombre de trois aujourd'hui en faveur des yourteurs, est désormais assez puissante pour que l'entêtement injustifié de la DDE, responsable des tourments de beaucoup de yourteurs, cède définitivement.
Mais il est déplorable que ces agressions illégales et immorales n'aient pu être vaincues que par une véritable lutte et une certaine organisation de la défense des habitants en yourte.
Pour résumer, les ennemis principaux des yourtes sont vaincus :
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La DDE vient d'être "neutralisée" pour tout ce qui concerne l'infraction au code de l'urbanisme par abscence de permis de construire. Etant entendu que la yourte reste non équipée. Désormais le terrain du contentieux se déplace sur cette notion d'équipement qui départage la tente de l'HLL.
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Grâce à la relaxe obtenue par mon procès en correctionnelle en 2008, qui d'ailleurs a offert au peuple des yourtes la première jurisprudence sur la nature juridique de leur habitation, la criminalisation des habitants en yourtes, par assimilation aux infractions de stationnement des nomades, (incrimination d'installation en réunion …) a été refoulée.
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Le Conseil Constitutionnel ayant rejeté l'inique projet de loi de Loppsi 2 créant une catégorie de sous-citoyens privés de tous droits, y compris du droit de propriété, par discrimination de la forme de l'habitat, le danger d'expulsion arbitraire sans débat contradictoire est écarté.
En conséquence, la reconnaissance du droit d'habiter dans une yourte dans ce pays est acquise.
Cela n'empêchera sans doute pas encore quelques anicroches, encore des résistances du pouvoir répressif, mais l'essentiel est fait.
Pour ma part, c'est l'aboutissement d'un combat de quinze années. Je suis heureuse qu'il aboutisse. Et très soulagée, car personnellement, je n'en pouvais plus.
Je n'aurais jamais imaginé un seul instant au début de mon aventure avec les yourtes à quel point j'allais payer cher cette liberté.
On veut habiter dans une yourte pour être tranquille et en cohérence avec ses idées, se rapprocher du bon sens, de la nature, des valeurs simples.
Pas pour se bagarrer.
L'activisme, le militantisme, pour moi, c'est de l'ordre de la nécessité, quand on ne peut pas faire autrement. On se bagarre parce qu'il n'y a pas d'autres choix, qu'on ne peut pas revenir en arrière, on est acculés.
Et il faut bien finir par gagner, car, comme le dit si bien Tom, rien n'est pire que de désespérer de la justice de son pays.
La justice est le fondement de la paix sociale.
Car la yourte est justement un symbole de paix, de recentrage, de transition.
Ce n'est pas un ballon de foot livré aux coups de pieds des brutes, ce n'est pas une pomme de discorde.
Tout au contraire, elle est l'espoir qu'un peuple nouveau, et en particulier des jeunes, dont ce jeune couple d'agriculteurs bio est un exemple emblématique, que ce peule des yourtes se lève pour vivre simplement, sans massacrer la terre, dans la dignité et la beauté.
Osons espérer enfin un peu de respect.
Sans doute fallait-il tout ce grabuge pour nous affirmer.
Sans doute fallait-il aussi que nous nous stimulions les uns les autres, habitants en modeste légereté, par quelques coups de becs.
Mais maintenant que le plus gros des combats est gagné, nous ne demandons qu'à retourner à nos jardins, à nos forêts, à l'abri des regards.
Maintenant que nous avons prouvé, en suant sang et boue, la validité, la légitimité et la légalité de nos démarches,
qu'on nous laisse enfin vivre en paix.
PS:
Contrairement aux affirmations de l'avocate de l'affaire de Tom et Léa, Caroline Mercary, cette jurisprudence favorable n'est pas la première concernant les yourtes, mais la troisième.
Ce n'est pas parce qu'un avocat médiatique débarque sur une affaire qu'il est le premier et le meilleur, encore faut-il qu'il se donne la peine de vérifier si d'autres avant lui n'ont pas déjà apporté leurs travaux à la cause. Ce qui n'a pas été fait.
Or, c'est bien le cas: sur d'autres procès précédents, des yourteurs et leurs défenseurs ont combattu, dans l'ombre, largement préparé le terrain et obtenu des victoires tout aussi décisives, pour peu qu'on les utilise. Dommage que ces précédents aient été totalement ignorés. Pourtant, et ce n'est pas un secret, je tiens à la dispostion de tous les yourteurs mis en cause et leurs avocats les actes officiels de ces jurisprudences, afin que leurs défenses puissent se construire sur une cohérence de notre cause collective.