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YURTAO, la voie de la yourte.
29 juin 2014

L'immensité d'où ça vient

yourte dans les fougères yurtao

Ce n'est pas seulement là où je suis.

C'est l'immensité d'où ça vient.

C'est la clarté et le silence d'où c'est né.

Ce n'est pas seulement la yourte

et pourtant, ce n'est que la yourte.

Dans cette peau bien mince autour d'un cercle vide,

dans cet espace à peine couvert, on peut, à partir de rien,

écouter le monde entier palpiter.

Au début, il n'y avait pas de conceptions sur la yourte.

Il y avait sur des images la façon dont c'était fait,

mais socialement, ici, il n'y avait pas de modèles, pas de pressions.

C'est peut-être grâce à cette absence de représentations,

avant les marchands,

que j'ai vu combien la yourte n'était pas qu'un abri

et combien plus qu'une tente.

C'est en partie grâce à l'absence de prescriptions du système

que l'œil limpide a pu s'ouvrir dans cette intimité.

Une vision grande ouverte qui m'a fait rencontrer la liberté du dedans.

C'est étrange comment, de la limite qu'on s'impose en clôturant un tout petit cadre et en retournant le regard vers soi, peut naître une conscience tellement large, un regard si vaste, une joie si profonde, capables de franchir le manifesté et s'établir dans la durée.

La yourte peut bouger partout. Elle se replie et s'en va.

Pourtant, c'est là que je me suis fixée

et que j'ai arrêté de chercher ailleurs la meilleure place.

Maintenant que je reste immobile,

pas un jour sans huiler les gonds de la perception,

pas une nuit sans fêter les noces de l'océan avec le firmament.

Je reste immobile sous le vent comme un arbre, et mes racines s'étendent dans la forêt, calmement, dans le noir profond de la terre. Alors l'incommensurable réseau de connexions du vivant se creuse et m'enfonce aux origines du monde. Plus je descends, plus j'approche le centre de la terre, jusqu'à découvrir un espace vide d'où est pulsée la matière.

Je reste immobile sous le vent comme un oiseau chantant le printemps, emportée dans le ciel et planant sur les courants d'air, et mes ailes s'étendent de plus en plus loin dans une transparence d'azur et de nacre. Alors l'imperceptible filet d'oxygène et d'ozone qui entoure le monde me propulse aux confins de l'univers, et plus je monte, plus mon œil s'agrandit, plus la terre rapetisse, jusqu'à flotter sur l'espace vide où s'orbite la matière.

Je reste immobile sous le vent comme une grenouille au bord de l'eau à livrer mes têtards aux ondes qui s'en vont dans le flux de la rivière. Alors l'impondérable fragilité de la vie m'emporte dans le ventre d'un poisson gobé par une baleine jusqu'aux soutes digestives du vivant. Plus je suis digérée, plus je saisis l'impérieuse nécessité d'un estomac vide à appeler le destin de tonnes de matières.

Je reste seule et tranquille sous le vent comme une ourse sur la banquise qui fond, attendant le phoque qui ne vient plus se faire prendre, et plus j'attends, plus la glace se délite et plus la mer s'ouvre. Le trou reste vide, il ne donne plus de matières et quand l'ourse s'affale,

le rêve s'arrête et c'est le réveil.

Alors je vois d'où est pulsée la matière,

pas de là où je suis,

mais de l'immensité au-delà de mes pieds, de ma tête,

au-delà de la yourte et de la colline,

ondes engendrées du vide impérissable

d'où naît la porte que « je suis ».

 

soleil chataigner yurtao

 

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Commentaires
N
La poésie ....vaisseau de la vie et des rêves infinis merci de cette beauté
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B
Moi aussi je lis cela au réveil et je me sens plonger dans le vaste univers, dans la poésie à sa source, là où naît la vie, où l'on sent la pulsion de la terre au creux de notre être. Merci infiniment pour ce partage du plus beau. Que la paix douce et profonde vous porte et transporte vers les immensités...bleues bien sûr
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P
Basile et l’espace sidérant. (une fiction).<br /> <br /> <br /> <br /> Toute l’humanité a disparu à la suite d’une peste intempestive et ravageuse ; médecins et guérisseurs ont été emportés avec leurs diagnostics par ce fléau, plus radical que la peste noire qui avait épargné Nostradamus mais pas ses enfants ni ses prédictions. Personne n’a vu venir l’ampleur mondiale et globale de l’épidémie pestilentielle. Le système immunitaire des homo-sapiens a abdiqué devant la virulence du mal mais sont restés en vie bon nombre d’animaux, les plus grouillants, les plus rampants dont on dit même qu’ils se moquent de doses de radioactivité mortelles pour l’homme. Ce n’est pas une météorite venue du ciel qui a éradiqué l’espèce humaine de la surface de la terre ni un chef d’état qui aurait appuyé sur le bouton rouge par inadvertance, déclenchant une troisième guerre mondiale qui serait venue enfin à bout de tous les hommes dans leurs luttes fratricides. Non c’est un virus sorti subrepticement d’un laboratoire, comme savent le faire les virus, qui est venu contaminer le monde entier, un tout petit virus dont personne ne se méfiait à part quelques apprentis sorciers, manipulateurs de génétique, quelque peu initiés mais fort imprudents. Vous allez me dire que tout est foutu ? Eh bien non ! Par je ne sais quel miracle, il reste deux individus sur la terre. Je vous dis ça de la station spatiale de laquelle nous ne pourrons plus redescendre. De plus, malheureusement, il nous reste très peu de vivres et en conséquence, très peu de « vivre ». Personne ne viendra plus nous chercher. Nous avons réussi à contacter ces deux individus et nous voulons les faire se rencontrer pour une question bien précise qui nous chagrine avant notre dernière heure : l’humanité réduite à deux hommes peut–elle trouver un modus vivendi de paix ? Si la réponse est positive, nous mourrons nous-même en paix, avec l’espoir d’une résurrection. Dans le cas contraire, nous mourrons dans une désespérance sidérante et sidérale, abandonnés de tous et même du hasard et de la nécessité qui auraient si bien fait les choses. Ah ! Voilà, nous leur avons envoyé leurs coordonnées respectives et ils se sont rencontrés. L’un des deux se présente, fervent partisan de la croissance exponentielle du profit ; spéculateur lui-même, il nous dit que ce virus a tout gâché son travail. L’autre annonce qu’il est agnostique doué d’espérance et qu’il ne voyait pas la fin du monde comme ça, il en est éberlué. Leurs regards se croisent et voilà que l’ex spéculateur est pris d’une haine inextinguible, d’une envie de meurtre, d’une pulsion primitive tyrannique probablement issue des profondeurs de l’antique caverne du bulbe céphalorachidien, là où se tapit le monstre, le tyrannosaure Rex. Le deuxième représentant de l’humanité resté sur la terre, voit dans le regard de son alter ego cette ombre plus noire que l’ombre et, un instant, il prend peur, mais se ressaisit. Il se demande quel genre d’extrémiste péremptoire et violent est cet interlocuteur. Il vient de comprendre que sa vie devait le mener là, au choix du martyre et qu’il serait le bouc émissaire qui porterait tous les maux de son adversaire. Il se demande qui va gagner la bataille, Romulus ou Remus ? Il n’y aura cependant pas de légende fondatrice de civilisation à partir de là car l’un et l’autre, les deux protagonistes ne pourront survivre bien longtemps. L’ex spéculateur a réussi à calmer sa pulsion de meurtre et dit à l’agneau agnostique : Je vais te raconter une histoire : Un scorpion voulait un jour traverser une rivière ; il demanda à une grenouille de le porter sur son dos afin d’atteindre l’autre rive. Mais au mitan de la rivière, une pulsion de mort subjugua l’arachnide et il piqua le batracien porteur. Les deux périrent noyés. Alors, fais ton œuvre, lui dit l’agnostique ! Non mon ami, lui dit celui qui avait profité de tout durant sa vie terrestre car je viens de comprendre qu’à deux on peut s’entendre, que nous sommes faits du même bois. Le dragon en toi, tu t’es évertué à le tuer un peu chaque jour en lui offrant ta vie, ce qui lui faisait peur et moi, de mon côté, je ne pouvais plus rien contre lui ; je viens de le voir mourir à l’instant. Marchons ensemble au paradis car il paraît qu’on n’y entre jamais seul mais toujours entre deux êtres réconciliés. Je dois vous dire qu’à l’issue de cette réconciliation, on pouvait mourir paisiblement en notre navette car nous étions déjà au ciel. Si un jour des êtres plus évolués que les hommes, moins péremptoires et moins violents découvrent les cadavres d’astronautes en une navette errant dans l’espace, ils se diront qu’à l’impossible nul n’est tenu, que les singes nus, les primates mammifères omnivores qu’on appelait des hommes, avaient très peu de moyens de réflexion à propos de leur place dans l’univers, qu’ils n’étaient pas ouverts à ça. Et on entendra dans l’immensité de l’espace la chanson de Léonard Cohen qui nous dit : who is reaching for the sky just to surrender ; who is reaching for the sky just to surrender. Bon! Le moment est venu de descendre de ma station spatiale pour vous souhaiter une bonne journée avec bonne acceptation de toutes différences.
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C
Premières choses que je lis au réveil...me voilà transportée pour la journée...<br /> <br /> Merci Sylvie.
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V
Tous simplement, magnifique.
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YURTAO, la voie de la yourte.
YURTAO, la voie de la yourte.

Fabriquer et habiter sa yourte, s'engager et inventer un nouvel art de vivre. Vivre le beau et le simple dans la nature.
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