Mes arguments juridiques contre le référé expulsion
Quatre sociétés immobilières m'attaquent pour la deuxième fois en procès.
Ces sociétés requièrent devant le tribunal d'Alès mon expulsion en urgence,
sous forme de référé, d'une parcelle litigieuse située à Bessèges dans le Gard.
Ils argumentent qu’ils ont acquis, le 8 septembre 2005,
par une adjudication régulière et définitive, cette parcelle,
et que le jugement d’adjudication m'a été signifié.
Que je ne peux ni contester le titre des adjudicataires,
ni justifier du mien pour occuper la parcelle litigieuse.
Que je suis une occupante sans droit ni titre de la propriété d’autrui
Qu'ils vont se retrouver en situation illégale à l’égard du Trésor Public si,
en leur qualité d’adjudicataires marchands de biens, ils n’ont pas revendu
la parcelle litigieuse (avant Septembre 2009) et que non seulement
mon expulsion doit donc être ordonnée sans désemparer
mais qu’ils doivent être dédommagés au titre de l’article 700 de 1000 euros.
L’association propriétaire à Bessèges de deux terrains cadastrés AH 161 et AH 25,
m'a autorisé, au cours de l’année 2004, à occuper la parcelle AH 25,
en installant les yourtes en patchwork que je fabrique et où j'habite,
moyennant débroussaillage et entretien
.
Un
an plus tard, le 8 septembre 2005,
l'association ayant été mise en liquidation judiciaire,
son patrimoine a été vendu aux enchères.
Trois ans plus tard, les quatre sociétés de marchands de biens
qui ont emporté les enchères ont déposé une plainte à mon encontre
sur le fondement des articles 322-4-1 et suivants du Code Pénal
pour "installation en réunion sur le terrain d’autrui en vue d’y établir une habitation."
J'ai été relaxée des fins de cette poursuite, par un jugement
du Tribunal Correctionnel d’Alès du 25 juillet 2008,
sur lequel il n'a pas été fait appel.
Sur
cette deuxième attaque devant le tribunal des référés
d'Alès,
il existe des contestations sérieuses
qui entrainent l'incompétence du juge des référés.
Par ailleurs, à supposer fondée la demande en expulsion formée contre moi,
je pourrais bénéficier de délais pour permettre mon relogement.
a) Le procès verbal descriptif contenu au cahier des charges de cette vente
contient des mentions inexactes qui l’entachent d’irrégularité.
Contrairement aux affirmations des demandeurs, il existait sur cette parcelle
des bâtiments à usage d’habitation et à l’intérieur, une habitante.
Dans ces conditions, j'aurais du être convoquée individuellement à l’adjudication.
La convocation doit comporter les indications
citées à l’article 7 du décret n° 77-742 du 30 juin 1977 dont celle de la mise à prix.
Le jugement ou procès verbal d’adjudication devait m'être notifié,
à la diligence du greffier du tribunal devant lequel l’adjudication a été prononcée,
entre le dixième et le quinzième jour suivant cette dernière.
Cette notification devait préciser le montant de la dernière enchère,
e nom et l’adresse de l’adjudicataire
et reproduire le texte du paragraphe II de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975
puis indiquer, s’il y avait lieu, que la convocation à l’adjudication n’a pas été faite.
En aucun cas, les adjudicataires ne peuvent donc se prévaloir
d’un titre résultant d’une adjudication régulière.
b) Le Droit de préemption urbain n’a fait l’objet
d’aucune notification de DIA et de purge :
Le cahier des charges contient une fiche de renseignements d’urbanisme
qui mentionne
au paragraphe « Droit de Préemption » : DPU : « Oui, commune ».
Or
je produis une lettre du Maire de Bessèges qui confirme
qu’aucune « demande de droit de préemption urbain » n’a été adressée à sa Mairie.
Or, les dispositions de l’article L 213-1 du Code de l’Urbanisme
s’appliquent aux ventes par adjudication.
(par ex. Cassation Civile
3ème Ch. Pourvoi 02-15879 Arrêt du 18
février 2004).
La D.I.A. doit être adressée au Maire
au moins trente jours avant la date fixée pour la Vente.
La purge du droit de préemption a lieu après la vente (R 213 et suiv.)
Aucune déclaration d’intention d’aliéner n’ayant été souscrite
dans les termes et conditions particulières aux ventes par adjudication,
l’acquisition dont se prévalent les demandeurs est nulle
et toujours susceptible d’être annulée.
c) Le transfert de propriété n’a été constaté par aucun acte authentique :
cette vente, plus de trois ans après le jugement d’adjudication,
n’a fait l’objet d’aucune transcription à la conservation des Hypothèques.
Or, aux termes des articles R 213 et suivants du Code de l’urbanisme,
une fois purgé le droit de préemption urbain,
le transfert de propriété opéré par le jugement d’adjudication doit être constaté
dans un acte authentique et transcrit à la Conservation des Hypothèques.
La Mairie ayant confirmé qu’elle n’a pas été mise en mesure
d’exercer son droit de préemption,
en violation des dispositions de l’article L 213-1 du Code de l’urbanisme,
cette vente est donc nulle, mais encore,
vu qu'elle est toujours non transcrite, elle est inopposable aux tiers.
Par conséquent, on peut constater au vu de la fiche d’immeuble, sur laquelle
le propriétaire de la parcelle litigieuse apparait toujours comme étant l'association,
les demandeurs ne rapportent pas la preuve de leur qualité de propriétaire
et ne peuvent donc poursuivre mon expulsion.
Il
est donc établi que si les demandeurs se prévalent d’un
jugement exécutoire,
ils sont loin de disposer d’un titre exécutable :
La vente dont ils se prévalent est irrégulière et susceptible d’annulation
pour violation de l’article L 213-1 du Code de l’Urbanisme et du défaut de purge du DPU.
Cette acquisition par adjudication n’est pas constatée dans un acte authentique
et n’est pas, plus de trois ans après l’adjudication,
transcrite par la Conservation des Hypothèques : elle m'est donc inopposable.
2) Contrairement aux affirmations des demandeurs,
je ne suis pas entrée irrégulièrement sur la parcelle litigieuse.
Les demandeurs ont tenté d’obtenir un jugement pénal qu’il puisse utiliser
comme preuve de cette entrée illicite, mais ils ont échoué.
J'occupe cette parcelle avec une autorisation verbale initiale d’une Association
tombée en liquidation judiciaire par la suite.
Mon occupation avec cette autorisation était notoire.
En contrepartie de mon occupation, il a été convenu
que je débroussaillerais et entretiendrais cette parcelle pour poser mes yourtes :
j'ai parfaitement rempli mon engagement.
Un tel arrangement est banal dans le monde rural qui reste imprégné
de l’esprit des droits d’usages coutumiers reconnus aux populations pauvres
sur les bois et forêts dès lors que l’activité qui en découle
ne fait l’objet d’aucun commerce.
C’est si vrai que le Code forestier de 1826 a entendu règlementer
ces droits d’usage coutumiers pour ce qui concerne les bois et forêts de l’Etat.
Jamais l’habitat des bûcherons charbonniers
et autres usagers de ces droits coutumiers,
n’a été par le passé, ni contesté ni menacé.
Je fournis plusieurs attestions et témoignages de personnes de mon canton
bénéficiant d'un tel contrat oral à l'amiable,
validant un droit d'usage coutumier fréquent en Cevennes:
jouissance et gratuité de terrains en échanges d'entretien, ce qui arrange
bien des propriétaires souvent éloignés et rassurés contre les risques d'incendie.
Si, du fait de la liquidation de l'association,
je n'ai pu me faire remettre une attestation
établissant par écrit cet
arrangement, il demeure que
mon occupation a été
notoire et tolérée
puisque j'ai même bénéficié d’une autorisation officielle par la mairie de Bessèges
de réaliser un branchement électrique pour mes yourtes.
Par conséquent, n’étant pas entrée dans les lieux irrégulièrement
et ma présence ayant été notoire et tolérée,
si je ne dispose pas d’un titre, je dispose cependant de droits!
En effet, l’expulsion d’un occupant sans droit ni titre,
disposant à l’origine, d’un droit de jouissance régulier,
ne peut être effectuée que dans les conditions prévues
par la loi du 9 juillet 1991, et le décret du 31 juillet 1992.
L’article 62 alinéa 1 de la loi de 1991, prévoit un délai
de carence de deux mois entre la signification du commandement et l’expulsion.
L’alinéa 2 permet de proroger pour une durée n’excédant pas trois mois le délai précédent.
De plus, les articles 613-1 et 613-2 du Code de la construction et de l’habitation
instituent un délai, d’une durée minimale de trois mois,
pour permettre le relogement de l’occupant.
Cependant, si je ne pouvais pas bénéficier des sursis précédents,
un délai de grâce allant de trois mois à trois ans pourrait m'être accordé.
Ces délais sont ceux prévus par l’article 1244-1 du Code civil.
En effet, la loi contre les exclusions de 1988
autorise d'office le juge à accorder des délais.
Mais encore faudrait-il que les demandeurs aient pris la peine
de notifier leur assignation au Représentant de l’Etat dans les formes et conditions
prévues par l’article 24 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989.
Encore faudrait-il que leur commandement de quitter les lieux soit régulier
au regard de la loi de 1991.Or, il n’en est rien.
Dans ces conditions, la demande d’expulsion formée par les demandeurs
est totalement irrecevable.