batifolage créatif
Exprimant ici une pensée et une pratique différente,
j'offre quelques repères autres,
peut-être un peu moins étriqués, à des jeunes qui,
pressurisés par le système de la pensée unique,
se croiraient obligés de faire comme tout le monde pour exister.
Qui hésiteraient à sauter par dessus les barrières.
Et qui risqueraient d'être tentés par une vie préemballée,
où tout le sauvage renâcle et se fâche avant de sombrer
dans le conformisme et la dépression.
Pourtant je n'ai rien inventé de génial,
je suis juste une bricoleuse de couleurs
et une chiffonnière créative,
je bidouille à l'intuition en interrogeant souvent mes rêves
et les introduisant à la réalité.
La structure du blog convient bien à ma passion du patchwork.
Bien qu'un fil, une histoire, une vision,
sous-tende la diversité des messages,
chacun peut se suffire à lui-même
et délivrer sa propre impression.
Les articles naissent comme ces choix de patchs
qui au départ n'ont rien de spécial,
mais dont l'assemblage final découvre,
avec la richesse révélée de chaque partie,
l'harmonie d'une construction spontanée très équilibrée.
Autrefois, avant les yourtes, je confectionnais de grands quilts
avec des milliers de chutes de tissu récupérées,
classées, découpées, cousues et matelassées,
et les gens s'exclamaient: « Quelle patience! ».
Ce qui m'étonnait toujours,
car je prenais tellement de plaisir à ma couture
que je ne me sentais jamais obligée de solliciter
la moindre vertu d'effort.
Le caractère méditatif de ces assemblages originaux
de matières banales, je l'ai connu aussi avec la création
d'un jeu de Tarot tout en collage,
des petits tableaux plein d'images récupérées
dans les salles d'attente,
les poubelles papiers et les bibliothèques,
du temps où elles donnaient facilement leurs vieux journaux.
J'y rajoutais des morceaux de slogans publicitaires disjointés,
ce qui provoquait le même effet mental,
dù à l'écartèlement entre l'image et le texte,
qu'un Koan Zen. Ce jeu fonctionnait merveilleusement bien
comme outil de connaissance de soi basé sur la synchronicité.
Jusqu'au jour ou j'ai détruit entièrement ces images divinatoires
parce que leur puissance archétypale
avait plombé mes images intérieures,
et que l'usage excessif que j'en faisais
avait gravement rogné ma liberté,
en m'avertissant de futurs que je n'étais pas de taille à assumer.
L'outil m'avait mangé, en quelque sorte,
j'étais tombée dans le piège du défi avec Dieu.
Vaincue, j'ai jeté par humilité,
pour recommençer autre chose, d'autres ensemencements.
De nouvelles méditations avec la peinture des mandalas évidement,
puis avec la grande aventure de fabriquer
tout en kit sa yourte dans un HLM, et maintenant avec le blog.
Il y a ce qu'on trouve en cherchant,
qu'on classe et qu'on range dans une chemise étiquetée,
dans un endroit sûr qu'on saura retrouver au moment voulu,
et ce qu'on amasse par fascination,
ce qu'on collectionne par fétichisme.
Et il y a aussi ce qu'on a commandé
et qui vous est délivré le jour décidé,
vous n'avez plus qu'à signer.
Il y a ce qu'on a repéré, qui s'est imposé dans le temps
et qu'on sait retrouver par ses propres balises,
même s'il faut un peu tâtonner.
Il y a ce qui est passé dans notre champ de vision,
dans notre aire de captation inconsciente, qu'on a oublié,
à quoi on a repensé alors qu'on est allongé dans son canapé
ou qu'on se verse une tasse de thé,
et qui s'annonce comme une évidence
qu'il suffit juste de remanier un peu,
et à qui il faut trouver une patère .
Ce qu'on a devant soi depuis toujours
et qu'un angle de vision inédit rend tout à coup signifiant.
Il y a ce qui revient de loin et n'attendait que soi,
ce moment ou enfin, on retrouve ses clefs et ses lunettes
et qu'on peut lâcher ses béquilles.
Il y a cette idée fixe pour laquelle on se bat,
et qui souvent ne débouche sur rien,
sauf sur une grande fatigue qui relâche les tensions
et rend libre l'attention.
Tout ce sur quoi on s'est fixé et n'a donné que des regrets,
qu'on a jeté, qu'on aurait du garder
et dont on ne peut plus faire qu'un poème un peu triste.
Il y a tout ce qui ne presse pas
et attend tranquillement dans un coin le moment opportun,
et tout ce s'effiloche au fond d'un tiroir,
qu'on achèvera qu'au petit bonheur la chance
si rien de plus important ne survient.
Et il y a surtout ce qu'on ne cherche pas
mais qui se présente à soi,
ce qu'on trouve sur son chemin
alors qu'on pense à autre chose,
qu'on va ailleurs ou dans du prévu qui roule tout seul,
ces petits trésors batifolants qui s'imposent à nous
par mille voies détournées au cours d'une balade, d'une course,
d'un surf, d'une invitation, d'une démarche, d'une manif,
et dont on ne sait pas quoi faire
parce qu'ils sont impromptus et aléatoires.
On les glisse dans sa poche pour les ramener chez soi, et là,
on les enfile en guirlande pour les suspendre devant sa fenètre
sans leur laisser le temps de s'échapper encore,
et on est tout surpris de cet air de fête qu'a pris la journée!
Et il y a ce qu'on ne trouve jamais,
qu'on piste désespérement,
qui manquera toujours, et qui pourtant,
par le trou insondable qu'il amène dans la matière,
creuse l'appel d'air qui fait respirer toute la création.