Une nouvelle victoire juridique pour un paysan habitant en yourte!
Voici une conclusion très satisfaisante aux poursuites contre Jean Luc Préaux, domicilié à Banyuls sur Mer( 66850), dont la procédure en correctionnelle s'est étalée sur les années 2011/2012.
Ce viticulteur implanté sur son terrain agricole au lieu dit « Le franc » depuis Avril 2007 cultive vignes et oliviers. Il exploitait déjà en fermage depuis une dizaine d'années ce terrain, situé en zone naturelle, avant de l'acquérir auprès de la Safer en 2006.
Il se loge dans une yourte avec ses fils, range ses outils dans un hangar en bois et élève des chevaux.
Suite à une requête d'une voisine propriétaire de la résidence secondaire "La tour Pagès", la plainte est classée sans suite par le procureur qui a considéré Jean-Luc "en état de nécessité".
Mais on est encore sous le gouvernement Sarkozy qui envoie des consignes dans les ministères pour soutenir les poursuites. Jean-Luc est donc convoqué au tribunal de Perpignan le 15 septembre 2011 pour « occupation d’une tente de type yourte, en méconnaissance du plan local d’urbanisme et omission de Déclaration Préalable pour un abri bois et trois cuves de récupération d'eau ».
L'affaire est renvoyée au 16 Février 2012 au TGI de Perpignan. La mairie constituée partie civile se retire. La DDTM demande la remise à l’état antérieur sous peine d’astreinte de 50 Euros par jour.
Le paysan bénéficie du soutien d'Halem, de Solidaires 66, de la Confédération paysanne régionale et nationale, de Défense Habitat Léger (Ariège) affiliée au DAL (Droit Au Logement).
Maitre Summerfield, l'avocate du prévenu, pose une question prioritaire de constitutionnalité.
"La condamnation à la destruction ou l'enlèvement d'une yourte, un cabanon ou une caravane, lorsqu'il est le seul habitat d'une personne, constitue une atteinte au droit au logement", faisant du prévenu un sans abri.
Le procès est d'abord renvoyé au 24 mai 2012, avant d'être une nouvelle fois renvoyé après les vacances d'été.
Procès contre une yourte et une activité agricole: http://www.halemfrance.org/spip.php?article85
Un viticulteur au tribunal menacé d'expulsion de sa yourte:
http://www.lindependant.fr/2012/02/16/un-viticulteur-au-tribunal-menace-d-expulsion-de-sa-yourte,117338.php
"Je vis dans une yourte pas pour le plaisir, par nécessité» http://www.lindependant.fr/2012/02/17/tribunal-je-vis-dans-une-yourte-pas-pour-le-plaisir-par-necessite-condamne-a-detruire-son-mobile-home,117542.php
Enfin, Jeudi 20 septembre au matin, le tribunal de Perpignan rend son délibéré,
rejette la demande de destruction de la yourte du viticulteur et prononce la relaxe.
Me Summerfield, dont la question prioritaire de constitutionnalité n'a pas été retenue, est très contente de cette décision.
"Même si je ne connais pas encore la motivation sur laquelle s'appuie le tribunal. Nous avions invoqué différents moyens, l'état de nécessité, le défaut d'affichage interdisant le camping sur le site… Il faudra donc attendre le jugement écrit. En tout cas c'est un très bon résultat, d'autant qu'il était absurde de poursuivre quelqu'un comme M. Préaux, qui vit de façon écologique et dont le travail de débroussaillage est cité en exemple dans le bulletin municipal…".
En relaxant l'agriculteur, qui a fait le choix de vivre dans une yourte installée sur son terrain faute d'autre logement, le tribunal correctionnel a mis un terme à plus d'un an de procédure.
Jean-Luc Préaux, entouré de membres de son comité de soutien, a exprimé son soulagement en espérant "que cela puisse servir d'autres causes".
Voici ce qu'en dit la Confédération Paysanne du Gard :
Pour de nombreux petits agriculteurs, en particulier ceux qui s’installent progressivement ou vivent, comme Jean Luc, dans des zones où le prix des logements est devenu prohibitif, le recours à l’habitat dit « léger » devient fréquent, dans un vide juridique propice aux inégalités de traitement.
Loin d’être un choix, ce recours est souvent pour les paysans le reflet de contraintes subies :
- décalage croissant entre prix du logement et revenu agricole
- offre de logement limitée (les retraités vendant leurs terres mais non leur logement)
ou détournée au profit du résidentiel « haut de gamme »,
- permis de construire agricoles de plus en plus restrictifs,
- locations réservées au tourisme saisonnier,
- Habitats à Loyers Modérés éloignés des lieux d’activité agricole, les communes de moins de 3 500 habitants n'étant pas soumises aux 20% de logements sociaux...
La Confédération Paysanne soutient tous les paysans qui revendiquent, à travers leur présence physique, le maintien d’une activité agricole réelle dans des zones devenues spéculatives.
Elle appelle les collectivités à prendre conscience du rôle joué par les agriculteurs dans l’entretien de leurs territoires et le maintien des services publics à l’année (écoles, postes...), rôle que ne remplissent que rarement le développement touristique et résidentiel secondaire. Elle les appelle également à répondre aux besoins en logements à loyer modéré au plus près des activités agricoles pour éviter le recours à des solutions précarisantes et conflictuelles. Elle les appelle enfin, au-delà des clichés, au dialogue avec des paysans en recherche de solutions pour le maintien de leur activité agricole, dans le respect des contraintes d’urbanisme quand celles-ci savent comprendre les leurs.
PS: Note de CHEYEN:
Nous pensons que le Parquet ne fera pas appel, car les socialistes n'appliquent pas la politique d'intrusion de la droite sur l'indépendance de la justice.
Si le ministère de la justice, sous régime socialiste, donne évidemment des directives de politique générale, il ne pratique pas l'acharnement et la remise en cause des juges, tels qu'ils furent pratiqués systématiquement sous le régime du karscher.
Nous nous réjouissons donc fortement de ce jugement!
Et bonne continuation à Jean-Luc et ses fils sur ses terres!
5 Octobre 2012:
Nous venons d'apprendre que le parquet fait appel !
Grave, très grave, mes dernières illusions sur ce gouvernement socialiste se sont envolées !
Je présente mes plus plates excuses à tous ceux qui ont cru à mon optimisme.